Les ancres sont l’un des éléments essentiels de la navigation. Nul marin ne peut envisager quitter terre sans embarquer des ancres à bord. Les ancres se cassent, se perdent, s’abandonnent et de fait on les embarque en nombre. Les ancres sont ainsi régulièrement découvertes sur le littoral méditerranéen français. Ces biens culturels maritimes sont des témoins du passage d’un navire.
Les ancres en pierre correspondent au tout premier modèle crée par l’homme et plusieurs matériaux ont été attestés : granite, calcaire, schiste, basalte etc. Le Musée de l’Ephèbe et d’archéologie sous-marine conserve une très belle collection d’ancres[1] et notamment des ancres en pierre en basalte. Bien qu’on les retrouve ailleurs en Méditerranée française, il existe au sein du musée un bel échantillonnage des différents modèles employés.
Les ancres sont étudiées depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Honor Frost (archéologue écossaise 1917-2010) a été une des pionnières en ce qui concerne l’archéologie sous-marine, mais également en matière d’étude des ancres. Denis Fonquerle se base notamment sur le travail d’Honor Frost pour réaliser celle des ancres du Musée de l’Ephèbe.
Nous évoquerons ici uniquement les ancres en pierre et plus particulièrement celles en basalte. On les appelle aussi ancres primitives puisque ce sont les premières ancres qui sont apparues.
Les pierres mouillages
Les premières ancres sont des pierres de mouillage qui correspondent à une pierre de poids suffisant comportant une rainure médiane qui permet d’attacher une corde sans qu’elle ne glisse. Ce type d’ancre est utilisé depuis le 3e millénaire avant n.ère. Elle l’est encore tardivement par les pêcheurs. Elle est essentiellement utilisée sur les fonds rocheux, car elle n’offre pas une grande adhérence dans les fonds sablonneux. Elles sont de formes variées.
Petit à petit, on voit évoluer leur forme. Les pierres sont percées d’un trou au centre (Fig.1). Ce dernier permet de fixer une corde. D’après l’iconographie on trouve des ancres de ce type entre le milieu du IIIe millénaire et le VIIIe siècle av. n.ère.
Les ancres à deux ou trois trous
Par la suite, le perfectionnement des ancres va entraîner une augmentation du nombre de trous : deux ou trois. Les plus classiques sont les ancres généralement triangulaires avec trois trous : un en haut et deux en partie basse. Le trou du haut permet d’amarrer le câble de l’ancre et les deux du bas sont fichés des bouts de bois qui permettent à l’ancre de s’accrocher au fond marin (Fig.2). Dans les années 1970, une étude réalisée par J.L. Vernet de la faculté des sciences de Montpellier, a montré que le chêne vert et le pin d’Alep sont les essences de bois les plus utilisées.
Il convient de souligner la découverte exceptionnelle de plusieurs ancres avec des inscriptions grecques notamment la lettre π (Fig.3).
La synthèse du tableau descriptif des pierres de mouillage et des ancres de pierre du Musée d’Agde réalisée par Denis Fonquerle (Fig. 4), nous montre que la majorité des ancres trouvées proviennent du fleuve (64 % des cas), que le basalte est le matériau de prédilection (87 % des cas), que leur poids oscille entre 7 et 87 kg. La datation des ancres en pierre n’est pas évidente car leur usage perdure jusqu’à l’époque contemporaine. Toutefois les ancres du Musée ont pour la plupart était découverte dans des contextes protohistoriques ou antiques.
[1] Ces ancres sont des biens culturels maritimes mis en dépôt par le DRASSM (Département des Recherches Archéologiques Subaquatiques et Sous-Marines), service du ministère de la Culture.
Céline Gomez-Pardies, archéologue CAHM et Marine Sadania, DRASSM – Ministère de la Culture,
avec la collaboration de Bertrand Ducourau, Conservateur des patrimoines ville d’Agde et de Marie-Pierre Jézégou, DRASSM- Ministère de la Culture
Sources :
- Fonquerle Denis. Les instruments d'ancrage en pierre au Musée d'Agde (Hérault). In: Revue archéologique de Narbonnaise, tome 4, 1971. pp. 207-215; doi : 10.3406/ran.1971.934
- http://www.persee.fr/doc/ran_0557-7705_1971_num_4_1_934